Il y a quelques jours, mes parents nous ont invité à un anniversaire plein de nostalgie. Celui de leur déménagement dans la maison qu'ils habitent maintenant depuis 40 ans, la maison où j'ai grandi donc et où j'ai tous mes souvenirs d'enfance. (clic pour la musique)
Ils quittaient alors une maison dont ils étaient locataires depuis leur mariage. Cette maison était elle-même voisine de celle où mon père a passé celles qu'il appelle lui-même "les meilleures années de son enfance".
Ils la quittaient avec regret, après la mort de leur ami qui en étaient le propriétaire. Avec le sentiment un peu amer qu'une promesse - la permission pour eux de rester là, et qu'on puisse y grandir tous les quatre - n'avait pas été tenue, une fois que le vieux monsieur était passé de l'autre côté...
Cette maison et son immense jardin sont donc restés dans leur histoire (et dans la mienne) comme un paradis perdu, et une page qui ne s'est jamais vraiment tournée. Moi je les ai à peine connus et je n'en ai aucun souvenir conscient (j'avais deux ans au déménagement...).
Mais pour la petite fille que j'étais et qui tournait souvent les pages des albums photos qui précèdent ma naissance, c'était comme tourner les pages d'un livre de contes.
Des contes d'un temps jadis où ma mère portait des robes qu'elle se cousait elle-même (moi qui l'ai toujours connue en pantalon) et où on pouvait faire de la luge dans le jardin ("mais où sont les neiges d'antan", tout ça, vous voyez? ). Ce jardin où semblait vivre toute une ribambelle d'enfants que je peinais à reconnaître (mes cousins en fait, mais qui avaient grandi, et déménagé dans une autre ville...) Aujourd'hui encore, je regarde ces images comme celles des livres de Satomi Ichikawa...
Mes parents ont donc dit adieu aux arbres majestueux du "parc", et déménagé leur grande famille vers une autre maison, aux murs et au jardin d'un coup rétrécis...
Mais l'histoire se termine bien, car ils ont pu recréer la chaleur du nid dans ce nouveau quartier plus central et plus gris. Ils n'ont pas perdu leurs amis de là bas (dont des commerçants des rues voisines, ils sont ainsi restés des années fidèles à la petite boucherie de l'autre côté du pont... je me souviens donc d'être passée de nombreuses fois en voiture sur les pavés devant cette grande maison-là, en me tordant le cou sur la banquette arrière pour apercevoir un bout de toit ou de fenêtre à travers les grands arbres). Et ils se sont enracinés, et nous avec eux, là où la vie les avait conduits, ma mère surtout toujours prompte à créer des liens et offrir son amitié, avec nos voisins deux portes plus loin, leurs enfants qui étaient nos amis, les jeux dans les jardins, les courses sur le trottoir, les trajets vers la petite école, la "dame d'en face", et puis les boulangers du coin de la rue... mais tout cela c'est une autre histoire
le goût de l'accueil et le bonheur de la nature en ville n'ont heureusement pas été perdus dans l'aventure...
Et dans votre famille, y a t'il aussi des lieux qui ont construit des légendes?